Histoire des Noirs au Canada

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2 AU L’histoire des Noirs Canada Note sur le langage Message aux enseignants et enseignantes L’histoire des peuples de descendance africaine au Canada est riche et complexe, et elle remonte à plus de 400 ans. L’étendue des expériences, des récits, et des identités des Noirs canadiens a contribué à façonner le pays que nous connaissons aujourd’hui, de Mathieu da Costa, interprète pour Samuel de Champlain et premier homme noir libre documenté à avoir posé le pied au début des années 1600 sur ce qui est maintenant connu comme le Canada, jusqu’à la population actuelle qui est estimée à plus de 1,5 million de personnes. La présence historique des Noirs au Canada est caractérisée par des colons qui opprimaient et asservissaient les personnes de descendance africaine dans ce pays, mais l’ensemble de l’histoire, qui comprend l’achat et l’asservissement des personnes d’origine africaine, les migrations forcées, et l’exploitation de leur travail, n’est pas largement reconnu dans le récit historique dominant de ce pays. Au lieu de cela, la participation à l’asservissement est souvent effacée des livres d’histoire au profit d’un récit qui est centré sur les voix blanches, qui réduit au silence les voix des Noirs canadiens, et qui met l’accent sur un Canada en tant que havre pour son rôle dans le chemin de fer clandestin. Ceci n’est pas qu’une injustice pour tous ceux qui ont souffert, mais empêche également les Canadiens de comprendre les histoires complexes et les expériences vécues par les nombreuses populations noires du pays. C’est aussi l’histoire de la manière dont les Noirs au Canada ont surmonté les obstacles et ont prospéré malgré les luttes constantes contre l’oppression et la discrimination. Le terme Noir fait référence aux peuples de descendance africaine et a toujours été enraciné dans les idéologies de race et de racisme, mais il a évolué pour refléter l’identité, la résistance, et les expériences historiques partagées de la diaspora africaine. Le terme personne asservie est utilisé au lieu du terme « esclave » afin de démonter l’humanité de ceux qui se trouvaient en servitude, tout comme « asservissement » au lieu d’ « esclavage ». De même, « asservisseur » prend la place de « propriétaire d’esclaves », à moins d’une référence directe à des documents historiques. Le mot « nègre » a été utilisé historiquement pour décrire les peuples noirs et pourrait apparaître dans ce guide lors de références à des organismes ou documents historiques comme des recensements, mais l’utilisation de ce terme n’est aucunement acceptable de nos jours. Le terme Canada est utilisé dans ce guide pour désigner les terres traditionnelles autochtones et les anciennes colonies françaises et britanniques qui sont maintenant appelées le Canada. Ce guide utilise principalement un langage contemporain pour se référer au Canada, à ses provinces, et à ses villes. Les noms Ontario et Québec sont utilisés de manière interchangeable avec le Haut-Canada et le Bas-Canada, ainsi qu’avec le Canada-Est et le Canada-Ouest. Les enseignants voudront peut-être utiliser la terminologie de l’époque avec leurs élèves. La diaspora africaine décrit les nombreuses communautés des peuples de descendance africaine qui vivent à l’extérieur de l’Afrique, particulièrement celles qui ont été disséminées à travers le monde à la suite de mouvements historiques comme la traite transatlantique des esclaves. La traite transatlantique des esclaves/commerce triangulaire a transporté plus de 12 millions d’Africains asservis, ainsi que des récoltes et des biens, entre l’Afrique, les Caraïbes, les Amériques, et l’Europe, entre le 16e et le 19e siècle. Nous encourageons les enseignants à utiliser cette occasion pour inciter une conversation plus vaste avec leurs élèves sur les concepts et la langue qui entourent la race et le racisme. Soyez attentif à la grammaire, y compris l’utilisation des temps, des articles, et des majuscules. Lorsqu’il est jugé approprié, veuillez discuter du langage historique relié à la période que vous explorez. L’enseignement de l’histoire des Noirs au Canada fait partie intégrante de l’éducation historique. En découvrant et en confrontant le passé, les Canadiens peuvent développer une compréhension et une appréciation plus profondes de la longue et riche histoire des peuples de descendance africaine dans ce pays, et ils peuvent commencer à lutter contre le racisme anti-noir qui est omniprésent. Plusieurs de ces expériences sont partagées, et elles chevauchent les histoires d’autres groupes démographiques. Bien que ce guide ne se penche pas sur ces histoires ou leurs récits interreliés, nous encourageons les lecteurs à mener d’autres recherches indépendantes sur ces sujets. Le Guide pédagogique sur l’histoire des Noirs au Canada devrait être utilisé comme point de départ pour d’autres recherches et apprentissages. Nous encourageons les enseignants et enseignantes à compléter les plans de cours qui sont contenus dans ce guide par le biais d’analyses des sources primaires et en s’intéressant à d’autres ressources qui explorent les expériences vécues par les Noirs canadiens, historiquement et de nos jours. Le Canada est un pays vaste, et les histoires légales, culturelles, sociales et démographiques d’une province ne reflètent pas l’ensemble. Durant des siècles, le Canada a été composé de colonies et de territoires qui ont été gouvernés de différentes façons. Historica Canada est le plus grand organisme du pays voué au développement de la sensibilisation au sujet de l’histoire et de la citoyenneté canadiennes. Le Guide pédagogique sur l’histoire des Noirs au Canada est conçu pour augmenter l’appréciation des élèves envers l’expérience des Noirs canadiens. Il explore divers aspects de l’histoire des Noirs au pays, incluant l’asservissement, la migration, la colonisation, le racisme anti-noir, le mouvement pour les droits civiques, les réalisations, et les expériences actuelles des Noirs canadiens. Le Guide pédagogique sur l’histoire des Noirs au Canada demande aux élèves d’examiner les questions sur l’identité, l’égalité, l’équité, la communauté, la justice, et l’édification de la nation dans des contextes historiques et contemporains. Ce guide s’aligne sur les programmes d’études canadiens actuels, et il a été produit pour être utilisé dans les salles de classe d’histoires et d’études sociales des écoles secondaires. L’histoire des Noirs au Canada est une histoire vivante. Les legs de l’asservissement et du racisme continuent d’affecter les communautés noires à travers le pays, et plus particulièrement sous la forme d’une discrimination antinoire individuelle et institutionnalisée. Les sujets de ce guide devraient être abordés d’une manière critique et pleine de compassion. Les enseignants doivent être sensibles à la dynamique individuelle et la dynamique de groupe, afin de s’assurer que la salle de classe demeure un environnement sûr pour tous les apprenants. Le climat de la classe devrait encourager les élèves à établir des relations positives, respectueuses, et solidaires, et les élèves devraient être informés des endroits où ils peuvent obtenir de l’aide. Il est important d’établir des règles de base pour avoir des discussions respectueuses et inclusives, et il serait important de pouvoir consulter les systèmes de soutien de votre école pour un soutien supplémentaire, au besoin. Ce guide a été développé en collaboration et en consultation avec Channon Oyeniran (candidate au doctorante), et les docteurs Natasha Henry, Dorothy Williams, et Karolyn Smardz Frost. Des ressources de soutien supplémentaires reliées à l’histoire des Noirs au Canada sont disponibles sur L’Encyclopédie canadienne. Pour plus d’informations, visitez HistoricaCanada.ca. Timbre avec Mathieu da Costa (Andrew Perro et Ron Dollekamp/ Postes Canada/2017)

3 SECTION 1 : L’asservissement au Canada La traite transatlantique des esclaves, également connue sous le nom de commerce triangulaire, a été établie au 15e siècle par divers empires européens pour amener des Africains kidnappés sur des terres colonisées par divers pays européens. À partir du début des années 1600 jusqu’à 1834, les colons établis dans ce qui est maintenant reconnu comme le Canada ont participé à la traite transatlantique des esclaves, en vendant, achetant, et asservissant des Africains. L’asservissement au Canada était légal, et les lois soutenaient les asservisseurs. Il était coûteux de payer des ouvriers européens, donc la demande pour des personnes asservies travaillant comme domestiques ou travaillant dans le domaine agricole était élevée. Les colons français et britanniques consommaient également des biens, comme du sucre, qui étaient produits dans les Caraïbes par des personnes asservies, et ils exploitaient le labeur des personnes asservies afin d’augmenter leur richesse personnelle et de stimuler la croissance des économies coloniales. Le premier Noir asservi connu pour avoir été kidnappé et emmené au Canada était un jeune garçon originaire de Madagascar ou de Guinée. Ce jeune homme est arrivé en Nouvelle-France en 1629, et a été nommé Olivier Le Jeune par le père jésuite Paul Le Jeune. Lorsque la Nouvelle-France est passée sous le règne des Britanniques en 1759, le Canada comptait plus de 3 000 personnes asservies, dont le tiers environ étaient des Noirs. Le saviez-vous? Les peuples autochtones constituaient deux tiers des peuples asservis au sein de la colonie de la NouvelleFrance. La plupart d’entre eux étaient des femmes et des jeunes filles forcées de travailler dans les centres urbains comme Montréal, et plusieurs d’entre elles étaient également échangées dans les Caraïbes. Après la guerre d’indépendance américaine, lorsque les loyalistes ont migré au Canada, le nombre de personnes asservies de descendance africaine a augmenté jusqu’à représenter la majorité dans ce pays que nous appelons maintenant le Canada. Les peuples de descendance africaine et autochtone, identifiés comme Afroautochtones ou Canadiens noirs et autochtones, ont une longue histoire sur cette terre, et ils continuent d’exister en tant que communauté distincte et culturellement riche. Bien que l’histoire des Afro-autochtones au Canada ne soit pas très bien documentée, un sens d’unité et de lutte commune a mené à des échanges culturels entre les communautés noires et autochtones depuis des siècles. Par exemple, de nombreux Autochtones noirs de la Nouvelle-Écosse ont entendu des récits générationnels au sujet de leurs ancêtres mi’kmaw aidant les personnes asservies, et plus tard les loyalistes noirs. Cependant, les politiques discriminatoires ont souvent forcé les gens à choisir entre les deux identités. Ces identités et héritages qui ont été autrefois perdus sont maintenant revendiqués grâce à des efforts comme le projet Proclaiming Our Roots. Parmi les personnalités autochtones noires notables figurent George Bonga, George Elliot Clarke, et Julian Taylor. La servitude sous contrat a existé parallèlement à l’asservissement dans ce qui est maintenant connu comme le Canada. Sous ce système d’exploitation, les individus signaient un contrat qui les liait à un travail non rémunéré durant une certaine période, souvent des années, en échange de transport, de logement, et de nourriture. Plusieurs personnes autrefois asservies étaient libérées, mais sous la stricte condition qu’elles devaient travailler en tant que serviteurs sous contrat pour leur ancien asservisseur. Par exemple, Dembo Sickles, un homme noir de l’Île-du-Prince-Édouard autrefois asservi, a dû travailler en tant que serviteur sous contrat de 1796 à 1802/03, après avoir été « libéré ». L’esclavage mobilier signifiait que les personnes asservies étaient considérées comme étant des biens par leur asservisseur, et n’était légalement pas des personnes. Les lois sur les biens mobiliers stipulaient que les enfants nés en asservissement étaient automatiquement des personnes asservies. Les abolitionnistes étaient des individus qui défendaient ou soutenaient la fin de l’asservissement et la liberté des personnes asservies. Les chercheurs de libertés étaient des personnes qui, parfois avec l’aide des abolitionnistes et du chemin de fer clandestin, cherchaient à se libérer de leur asservissement. Le terme est censé refléter le fait que bien qu’ils se trouvaient physiquement asservis, leur intellect et leur esprit demeuraient libres. TERMES CLÉS James Murray, le premier gouverneur britannique de Québec (Galerie nationale de portraits/NPG 3122) Loi impériale de 1790 (TPL Virtual Exhibits) Portrait d’une femme haïtienne, 1786, par Francois Malepart de Beaucourt (M12067/Musée McCord Stewart)

4 Analyse de la source primaire 1. Veuillez former des petits groupes, et ensembles, lisez les publicités sur la Feuille de travail : Analyse de la source primaire. Tenez compte des formulations et des images connexes. 2. Lorsque vous avez examiné les publicités, répondez aux questions suivantes pour chacune d’entre elles : a. À quel moment et où a été produite chacune de ces publicités? b. Pourquoi ces documents ont-ils été produits? c. Étudiez les caractéristiques que les asservisseurs utilisent pour décrire les personnes asservies. Que remarquez-vous sur la façon dont ils sont décrits? d. Qu’apprenez-vous sur les sujets de chaque document? e. Que peuvent nous apprendre ces publicités au sujet de l’esclavage dans le Canada colonial? 3. Avec votre classe, discutez de vos réponses et partagez ce que vous avez appris de ces publicités. Utilisez ces questions pour mener la discussion : a. Que reflètent ces documents sur les attitudes et les opinions envers les Noirs dans les colonies qui constituaient le Canada de l’époque? b. Quelles questions avez-vous au sujet de ces publicités? Qu’est-ce que nous ignorons au sujet de ces sources? c. De quelle manière ces publicités contribuent-elles à une meilleure compréhension des conditions auxquelles faisaient face les femmes, hommes et enfants noirs? ACTIVITÉ 1.1 ACTIVITÉ 1.2 Marie-Josèphe Angélique Publicités sur l’asservissement Marie-Josèphe Angélique était une femme noire asservie qui a été accusée de l’un des plus tristement célèbres crimes de l’histoire du Québec. En 1734, elle a été accusée d’incendie criminel après qu’un incendie ait ravagé le quartier des marchands de Montréal. Il a été allégué que Marie-Josèphe Angélique aurait commis cet acte en tentant de s’échapper de sa servitude. Elle a été condamnée, torturée, et pendue. Bien qu’on ne sache toujours pas si elle a réellement provoqué cet incendie, l’histoire de Marie-Josèphe Angélique est devenue un symbole de la résistance et de la liberté des Noirs. 1. En classe, écoutez cet épisode de la baladodiffusion sur Marie-Josèphe Angélique de la série Fort et libre. 2. Organisez une discussion avec votre classe sur ce que vous avez appris : a. Qu’est-ce que signifie le fait d’être asservi? b. Que révèle l’histoire de l’asservissement au Canada sur la société coloniale de la Nouvelle-France? Que révèle-t-elle sur la société canadienne d’aujourd’hui? c. Afua Cooper dit dans le balado : « Elle [Marie-Josèphe] était une esclave. Ce n’est pas comme si quiconque avait de la sympathie pour elle. Personne n’avait de la sympathie pour elle. » Son statut de personne asservie a joué contre elle lors de son procès. Pouvez-vous penser à d’autres cas où les circonstances d’une personne ont joué contre elle? Dans un procès? Dans un emploi? Dans une salle de classe? d. Que signifie le principe d’être « innocent jusqu’à preuve du contraire »? Quels sont certains des obstacles qui peuvent affecter l’innocence perçue d’une personne de nos jours? e. Y a-t-il des conditions d’asservissement présentes dans notre monde moderne actuel? 3. Après avoir discuté de ce qui précède, veuillez lire l’article sur Marie-Josèphe Angélique sur L’Encyclopédie canadienne. Rédigez une page expliquant pourquoi vous croyez que Marie-Josèphe Angélique a été blâmée pour l’incendie au lieu d’une autre personne asservie ou d’un colon blanc. Que nous révèle la décision du public qui l’a jugée ainsi sur la manière dont les personnes asservies étaient traitées en NouvelleFrance, sur la façon dont elles étaient censées se comporter, et sur les dangers de contester cette structure? Gardez à l’esprit que tout ce que nous savons sur sa vie provient de ce procès qui l’a condamnée. Plan de Montréal, 1700 (Bibliothèque et Archives Canada) Image prise de l’épisode de balado de la série Fort et libre sur Marie-Josèphe Angélique (Historica Canada) La Gazette officielle du Québec, 1778

5 SECTION 2: Les Loyalistes noirs, les Marrons, et les Réfugiés noirs de la Nouvelle-Écosse Entre 1783 et 1785, plus de 3 000 Noirs récemment libérés ont navigué de l’est des États-Unis vers la Nouvelle-Écosse, et ont établi des communautés dans les régions comme Shelburne, Annapolis Royal, Digby, Sydney, et Halifax. Alors que la majorité des Noirs loyalistes fuyant les États-Unis se sont installés en Nouvelle-Écosse, d’autres ont été transportés dans des pays d’Europe, dans les Caraïbes, et dans les provinces de Québec, du Nouveau-Brunswick, et de l’Ontario, et ils s’y sont installés. Les loyalistes noirs étaient considérés comme des personnes libres aux yeux de la loi, mais ils étaient néanmoins victimes de racisme endémique, de discrimination, et de violence sous diverses formes. Plusieurs d’entre eux n’ont jamais reçu la terre qui leur avait été promise, et ceux qui l’ont reçue se sont souvent vus attribuer des parcelles de terrain inexploitables. Les loyalistes blancs ont également eu la permission d’importer avec eux des Africains et des Autochtones asservis lorsqu’ils se sont installés dans les colonies après la guerre d’indépendance. Après des années de conditions difficiles comme l’injuste distribution des terres, la ségrégation raciale, le manque de soutien de la part du gouvernement, les emplois mal rémunérés, l’inégalité, et l’hostilité, plusieurs loyalistes noirs de la Nouvelle-Écosse ont présenté une requête pour partir à la Couronne anglaise. En 1792, les Britanniques ont offert des terres et la possibilité de créer et de régir des politiques dans la colonie britannique ouest-africaine de Sierra Leone, et 1 200 loyalistes noirs ont quitté la NouvelleÉcosse pour s’installer à Freetown, la capitale de la nouvelle colonie. Quelques années plus tard, en 1796, environ 600 hommes, femmes, et enfants, appelés les Marrons de Trelawny, ont été exilés de la Jamaïque vers la Nouvelle-Écosse. À leur arrivée, les Marrons ont été installés dans des endroits comme Halifax et Preston. Les hommes travaillaient principalement comme ouvriers, cultivateurs, ou en construction, alors que les femmes et les enfants fournissaient des provisions comme des baies, des œufs, de la volaille, des cochons, des balais, et des paniers au marché local. En 1800, après quelques années difficiles d’hivers froids, de nourritures inconnues, et de délais dans les livraisons des fournitures et des vêtements, la majorité des Marrons sont partis pour Freetown à Sierra Leone, tout comme les loyalistes noirs l’avaient fait huit ans auparavant. Bien que les Marrons de Trelawny ne soient restés en Nouvelle-Écosse que durant quatre ans, ils ont laissé un héritage qui inclut la troisième reconstruction de Citadel Hill et la construction de l’Hôtel-du-Gouverneur, la maison du lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse. Une troisième vague de migration de Noirs arrivant en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick est survenue après la guerre de 1812 entre les États-Unis, la Grande-Bretagne, et leurs alliés respectifs. Ces migrants étaient des personnes asservies venant des États de la Géorgie, du Maryland et de la Virginie, qui avaient, eux aussi, accepté l’offre de liberté des Britanniques s’ils combattaient à leurs côtés. À la fin de la guerre, en 1815, 2 000 des quelque 4 000 Noirs asservis qui s’étaient enrôlés sont montés à bords des navires britanniques vers la Nouvelle-Écosse. Quelques se sont dirigés vers le NouveauBrunswick, et d’autres se sont installés dans d’autres colonies britanniques comme Trinidad dans les Caraïbes. Tout comme les loyalistes noirs et les Marrons de Trelawny avant eux, ces réfugiés noirs ont fait face à de l’hostilité, de la discrimination raciale, et des difficultés économiques en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick. Toutefois, contrairement à leurs prédécesseurs, seuls 95 d’entre eux ont quitté les provinces pour s’installer ailleurs. La majorité est restée, et ces gens se sont fait une vie au sein de communautés comme Preston, Hammonds Plains, Beechville, Five Mille Plains, Beaverbank, et Prospect Road. Les Marrons étaient des groupes d’Africains et leurs descendants, qui ont fui l’esclavage mobilier dans les Amériques et ont trouvé refuge dans les montagnes éloignées ou dans les régions tropicales des régions voisines. Le terme « Marron » vient du mot espagnol « cimarrón » qui signifie « sauvage ». Les communautés des Marrons ont été principalement fondées dans les Caraïbes et à travers les Amériques. Les loyalistes noirs étaient des Afro-américains asservis ou sous contrat ainsi que certains Noirs libres ayant combattu pour les Britanniques durant la guerre d’indépendance américaine (de 1775 à 1783). On leur avait promis à la fois la liberté et une terre en échange de leur service. Un bon nombre d’entre eux se sont retrouvés au Canada. TERMES CLÉS Bûcheron noir à Shelburne en Nouvelle-Écosse (Bibliothèque et Archives Canada/no d’acc 1970188-1090/Collection d’œuvres canadienne de W.H. Cloverdale) Leonard Parkinson, capitaine des Marrons de la Jamaïque (British Library) Le bassin Bedford, près de Halifax (Bibliothèque et Archives Canada/ no d’acc 1938-220-1) Une illustration des peuples anciennements asservies arrivent en Sierra Leone (Samuel Goodrich, 1839)

6 La période entre 1780 et 1820 a vu une forte croissance de la population noire dans l’est du Canada. Cette période comporte plusieurs événements et personnages notables qui ont laissé une influence durable sur l’histoire du Canada. 1. Choisissez un individu ou un événement entre 1780 et 1820 sur lequel vous allez vous concentrer. Faites des recherches sur votre sujet choisi, et créez une affiche présentant les dates clés, les faits, les moments importants pertinents, ainsi que l’impact qu’a eu votre sujet. 2. Rassemblez et affichez les affiches de votre classe en ordre chronologique tout autour de votre salle de classe ou dans le corridor. Pour les individus, placez-les sur la chronologie en fonction du moment le plus historiquement important qui s’est produit durant leur vie, selon vous. 3. Prenez le temps de lire les affiches de la classe. Discutez des tendances que vous voyez dans la chronologie. Quelles informations pouvez-vous retenir sur la vie des Noirs canadiens durant cette période? ACTIVITÉ 2.1 Une population croissante SECTION 3 : Mouvements abolitionnistes et le chemin de fer clandestin En juillet 1793, la Loi visant à restreindre l’esclavage dans le Haut-Canada a été adoptée à la Chambre d’assemblée. De façon cruciale, cette loi a décrété que les enfants nés après 1793 de mères asservies gagneraient leur liberté à l’âge de 25 ans, et que leurs descendants seraient à leur tour libre à la naissance. Cependant, la loi ne libérait pas ceux qui étaient déjà asservis, et elle n’empêchait pas la vente de personnes asservies dans la province ou de l’autre côté de la frontière, bien qu’elle interdisait l’entrée de personnes asservies dans le Haut-Canada. Donc, toute personne asservie amenée dans la province était automatiquement considérée comme étant libre. Malgré le fait que les asservisseurs aient été tenus, par ce nouveau projet de loi, d’assurer la sécurité des enfants asservis dans leurs domiciles, ainsi que la sécurité de ceux qu’ils possédaient autrefois, plusieurs d’entre eux ont contourné cette loi, et très peu d’entre eux ont eu à subir des répercussions juridiques. En 1793, au Bas-Canada, un projet de loi a été présenté à l’Assemblée législative pour abolir l’asservissement. Cependant, certains des membres de l’Assemblée législative (certains entre eux-mêmes des asservisseurs) se sont opposés au projet de loi, et celui-ci n’a pas été adopté. D’autres projets de loi ont également été présentés à travers les provinces pour tenter de réglementer et d’abolir l’asservissement, mais la plupart ont été rejetés. Néanmoins, ces projets de loi ont représenté un mouvement plus vaste, mené par les Noirs et leurs sympathisants, pour repousser les lois protégeant l’asservissement et les asservisseurs, et pour empêcher l’adoption de nouvelles lois, affaiblissant ainsi l’institution. En février 1798, dans une affaire judiciaire qui a créé un précédent, une femme noire asservie appelée Charlotte a été arrêtée à Montréal après avoir quitté son asservisseur et avoir ensuite refusé de retourner. Son cas a été porté devant le juge en chef James Monk, qui l’a libérée parce qu’à l’époque, les personnes asservies ne pouvaient qu’être détenues dans des maisons de correction, et non dans des prisons. En raison du manque de maisons de correction à Montréal, Monk a décidé que Charlotte ne pouvait être détenue et elle a donc été libérée. Il y a eu d’autres cas semblables à celui-ci qui ont fait en sorte que l’asservissement a diminué dans les colonies canadiennes, bien que leur succès ait varié d’une province à l’autre. Alors que ces efforts abolitionnistes se déroulaient au Canada, de plus grands efforts antiasservissement augmentaient en Grande-Bretagne, ce pays qui avait joué un rôle clé dans la traite transatlantique des esclaves. Les abolitionnistes britanniques tentaient de démanteler la traite des esclaves et l’esclavage depuis les années 1770, mais ce n’est qu’avec la Loi sur l’abolition de la traite des esclaves de 1807 que la traite transatlantique des esclaves a été abolie par le Parlement britannique, mettant ainsi fin au trafic légal d’Africains réduits en esclavage à travers l’Atlantique. Cependant, la loi n’a pas mis fin à la pratique d’asservissement dans les colonies britanniques. Cette pratique a été abolie à travers l’Empire britannique en août 1833 grâce à la Loi sur l’abolition de l’esclavage, qui est entrée en vigueur le 1er août 1834. Cette loi a rendu illégale la possession de personnes africaines asservies et de leurs descendants. Ceci a présenté encore plus le Canada en tant que havre important pour ceux qui fuyaient l’asservissement aux ÉtatsUnis, ou cette institution n’a été aboli qu’en 1865. Référez-vous aux publicités no 9 et no 10 de la Feuille de travail : Analyse de la source primaire de l’activité 1.2. Identifiez les dates de chaque publicité ainsi que l’âge des personnes qui se sont enfuies. Qu’est-ce que cela vous apprend sur la Loi visant à restreindre l’esclavage dans le Haut-Canada de 1793 et sur sa mise en œuvre? Individus Boston King (Nouvelle-Écosse) David George (Nouvelle-Écosse) Stephen Blucke (Nouvelle-Écosse) Thomas Peters (NouveauBrunswick) Zimri Armstrong (NouveauBrunswick) Richard Pierpoint (Ontario) Peter Martin (Ontario) John Baker (Ontario) Sarah Colley et George Wentworth Colley (NouvelleÉcosse) Gabriel Hall (Nouvelle-Écosse) Richard Preston (Nouvelle-Écosse) Événements Les émeutes raciales de Shelburne, 1784 La charte royale de Saint John, 1785 L’arrivée du HMS Regulus, en mai 1815 (NouveauBrunswick) La Loi impériale de 1780 La Loi visant à restreindre l’esclavage de 1793 La Petition of Free Negroes (Pétition des nègres libres) Les troupes de couleur et la guerre de 1812 SUJETS DE RECHERCHE POSSIBLES

7 Le système secret qui a aidé les périples entrepris par les chercheurs de liberté est maintenant appelé le chemin de fer clandestin. Il s’agissait d’un réseau de routes, de maisons de refuges, et de personnes qui aidaient les Afro-américains asservis à s’échapper, incluant au Canada, et principalement durant le milieu du 19e siècle. Il a été le plus grand mouvement de liberté anti-esclavagiste de l’Amérique du Nord. Les abolitionnistes venaient de tous les horizons : des Noirs libres et d’autres personnes asservies, des sympathisants blancs et autochtones, des agriculteurs, des habitants de centres urbains, et bien d’autres. Ensemble, ils ont aidé les chercheurs de liberté à atteindre la sécurité. Toutefois, il est important de noter que de nombreux abolitionnistes avaient tout de même des convictions racistes et qu’ils se livraient à des pratiques discriminatoires. Avant et après que l’asservissement soit devenu illégal à travers le Canada en 1834, le racisme contre la communauté noire était hautement visible et il existait à tous les niveaux de la société et du gouvernement. Les idées entourant l’infériorité raciale étaient utilisées pour justifier le racisme flagrant, et de nombreux Noirs au Canada étaient ségrégés, exclus, ou se voyaient refuser l’accès égal aux différents services et opportunités. Certains abolitionnistes blancs ont même plaidé pour des projets de colonisation dans les endroits comme l’Afrique de l’Ouest. La ségrégation raciale contre les Noirs était différente dans chaque province et territoire, ainsi que dans les diverses communautés. Néanmoins, dans toutes les colonies, les Afro-Canadiens ont résisté à l’oppression et à la discrimination raciale, et ils ont surmonté les obstacles placés devant eux, pour contribuer à bâtir le Canada que nous connaissons aujourd’hui. À la suite de la Fugitive Slave Act américaine de 1793, il est devenu légal aux États-Unis de capturer toute personne autrefois asservie s’étant évadée dans les États du Nord, et de les ramener à leur asservisseur dans le Sud, où l’asservissement était toujours largement pratiqué. Ceci a poussé de nombreuses personnes asservies à chercher la liberté dans le Haut-Canada, où la Loi visant à restreindre l’esclavage de 1793 garantissait que toute personne asservie devenait libre à son arrivée dans la province, et la Loi sur les criminels fugitifs de 1833 aidait à protéger ces personnes contre leur extradition vers les États-Unis. Le nombre de chercheurs de liberté traversant la frontière a augmenté après l’adoption de la Fugitive Slave Act de 1850 aux États-Unis, qui a renforcé l’application de leur loi de 1793 au niveau des individus et des États, et a rendu plus facile le retour forcé des personnes autrefois asservies à leur asservisseur. Alors que 1793 a marqué le commencement du rôle du Canada en tant que destination pour les chercheurs de liberté sur le chemin de fer clandestin, les personnes asservies dans le Haut-Canada qui n’étaient pas libérées en vertu de la loi partaient souvent en quête de liberté au sud de la frontière dans les États libres comme New York et le Vermont. Robert Patterson John Anderson Jesse Happy Francis Griffin Simpson Joshua Glover Harriet Tubman Solomon Moseby Anna Maria Weems Ann Maria Jackson Deborah Brown Mme Pipkin, Mary (ou Louisa) Pipkin Josiah Henson Enerals et Priscilla Griffin Révérend William Troy William « Jerry » Henry William Parker Henry et Mary Bibb Shadrach Minkins Cornelius Sparrow Activité 3.1 Le chemin de fer clandestin Les chercheurs de liberté ont trouvé refuge et se sont installés dans divers endroits dans l’est du Canada. Il existe d’innombrables histoires sur des personnes courageuses qui ont fait ce périple et se sont installées au Canada, mais plusieurs d’entre elles ont été perdues dans l’histoire. 1. Visionnez la Minute du Patrimoine sur le chemin de fer clandestin, et lisez l’article de L’EC. 2. Discutez du récit de la Minute du patrimoine sur le chemin de fer clandestin, et sur les manières dont il pourrait réfuter ou perpétuer des idées fausses ou une compréhension désuète de cette période de notre histoire. Examiner le rôle de la femme blanche, et la façon dont la vidéo se termine sur l’exclamation « nous sommes au Canada ! » Que feriez-vous différemment si vous aviez à refaire cette Minute aujourd’hui? 3. En petits groupes, faites une recherche sur l’une des personnes de la liste ci-dessous, et créez ensuite une présentation numérique ou un tableau d’affichage pour illustrer ce que vous avez trouvé. Que révèlent ces personnes sur le chemin de fer clandestin? Que peut nous dire leur histoire au sujet des conditions et des circonstances des Noirs aux États-Unis et au Canada à cette époque? Quel contexte leur histoire fournit-elle sur les obstacles rencontrés par les Noirs, à la fois au niveau individuel et systémique? De quelle manière leur histoire pourrait-elle être représentative des autres histoires du chemin de fer clandestin (ou non)? Partagez votre présentation avec la classe. Henry Bibb (Bibliothèque historique Bentley de l’Université de Michigan) En 2021, le 1er août a été déclaré Jour de l’émancipation au Canada. FIGURES DU CHEMIN DE FER CLANDESTIN

Image prise de la vidéo sur Thornton et Lucie Blackburn (Historica Canada) 8 ACTIVITÉ 3.2 ACTIVITÉ 3.3 Les Blackburn Baladodiffusion sur Mary Ann Shadd Cary 2. L’histoire des Blackburn comprend trois éléments clés : le chemin de fer clandestin, l’histoire juridique dans le Haut-Canada, et la vie comme personne noire dans le Haut-Canada. En faisant des paragraphes ou un tableau, notez des manières dont l’histoire des Blackburn s’entrecroise avec ces catégories. Examinez à la fois la façon dont leurs vies ont été influencées par les circonstances qui les entouraient, et la manière dont ils ont, à leur tour, influencé leur entourage. 3. En petits groupes, discutez ce que vous avez appris de leur histoire. À quels obstacles ont-ils dû faire face dans leur périple vers Détroit, et ensuite vers le Haut-Canada? Quelles étaient certaines des lois et pratiques qui ont influencé leur périple? D’après leur histoire, à quoi un chercheur de liberté pouvait-il s’attendre de la vie dans le HautCanada? Que pouvons-nous apprendre sur les conditions auxquelles les Noirs ont été confrontés, et que cela révèle-t-il sur la société dans son ensemble? Selon vous, pourquoi l’histoire des Blackburn a-t-elle été oubliée durant si longtemps? Comparez l’histoire des Blackburn avec les histoires sur lesquelles vous avez fait des recherches lors de l’activité 3.1. De quelles manières ces histoires sont-elles semblables, et en quoi sont-elles différentes? Qu’est-ce que cela révèle sur la diversité des expériences que les gens ont vécues? Si leurs histoires impliquent différentes provinces ou différentes époques, de quelle manière ces circonstances différentes ont-elles affecté leurs cheminements et leurs expériences? 1. Écoutez l’épisode de baladodiffusion de la série Fort et libre sur Mary Ann Shadd Cary, et lisez l’article sur son histoire. 2. En classe, discutez de l’importance historique de Mary Ann Shadd Cary (utilisez les concepts de la pensée historique). Réfléchissez à la raison pour laquelle une femme noire publiant un journal aurait été révolutionnaire à cette époque et à cet endroit. Qu’est-ce que son journal aurait pu couvrir qui aurait été laissé de côté par les médias grand public? Pour qui ce journal aurait-il été important? Quelles personnes et quelles perspectives auraient pu bénéficier de cette plateforme pour la première fois? 3. Réfléchissez à ce que dit Garvia Bailey dans le balado : « Un journal est important, car il permet de garder une trace des événements. Ce que vous publiez sur le moment devient la façon dont nous comprenons l’histoire ». En gardant ceci à l’esprit, créez la première page d’un journal qui couvre les enjeux sociaux et politiques actuels, et les intérêts qui sont importants pour vous. Tenez compte de vos préjugés et de votre perspective : qu’est-ce qui influence les nouvelles que vous choisissez de partager? Consultez le guide pédagogique Médias numériques : développer les habiletés de pensée critique pour avoir plus d’informations sur le choix de sources d’information fiables. 4. Comparez votre page de journal à celle de deux ou trois camarades de classe. Y a-t-il des questions couvertes par plusieurs personnes, et si oui, lesquelles? Quelles différences pouvez-vous voir dans ce qui est couvert? Avez-vous découvert des enjeux ou des événements dont vous n’aviez pas connaissance auparavant? 5. Organisez une discussion en classe : d’après cet exercice, croyez-vous que le paysage médiatique du Canada d’aujourd’hui est représentatif des personnes qui vivent ici? En quoi est-ce comparable à la représentation dans le passé? Consommez-vous une variété de médias sous différents angles? Et si non, de quelle manière pouvez-vous mettre en œuvre des changements dans votre propre consommation d’information? Mary Ann Shadd Cary (Bibliothèque et Archives Canada/C-029977) ACTIVITÉ D’APPROFONDISSEMENT L’histoire de Thornton et de Lucie Blackburn est l’une des nombreuses de cette époque qui ont été perdues dans l’histoire, jusqu’à ce qu’une fouille archéologique révèle leur histoire unique et leur lien au chemin de fer clandestin. 1. Visionnez la vidéo sur Thornton et Lucie Blackburn, et lisez leur biographie ainsi que l’article sur L’histoire des Noirs au Canada jusqu’en 1900 sur L’Encyclopédie canadienne. Vous voudrez peut-être aussi faire des recherches supplémentaires.

9 M ême si les Noirs étaient considérés comme étant libres, ils n’étaient souvent pas les bienvenus dans les communautés à prédominance blanche disséminées à travers ce pays qui est maintenant le Canada. Une grande partie du racisme inhérent et systémique que les chercheurs de liberté avaient fui aux États-Unis se retrouvait également dans leur nouveau foyer. Malgré et à cause de cela, de nombreux Noirs ont bâti leurs propres communautés. Africville, en Nouvelle-Écosse, a été colonisée au milieu du 19e siècle par des personnes autrefois asservies, des Marrons, des loyalistes noirs, et des réfugiés noirs. La Petite-Bourgogne a abrité une grande partie de la communauté noire anglophone de la classe ouvrière de Montréal par les années 1880. Chatham, en Ontario, a été colonisée au début des années 1800, et est ensuite devenue un havre pour les chercheurs de liberté en provenance des États-Unis. Dans l’Ouest, les premiers immigrants noirs en Colombie-Britannique sont arrivés de la Californie en 1858, et ils se sont installés à Victoria et à l’île Salt Spring, après avoir été sollicités par James Douglas, le premier gouverneur de la Colombie-Britannique et fils d’une femme noire créole de la Barbade et d’un homme blanc. James Douglas a promis à certains Noirs californiens de leur offrir la citoyenneté britannique après cinq ans de propriété foncière, ainsi qu’une entière protection de la loi dans l’intervalle. Plusieurs centaines de familles noires ont déménagé dans la colonie, y compris un homme nommé Mifflin Gibbs. Après avoir passé plus d’une décennie au Canada, Mifflin Gibbs était devenu un homme prospère. Il s’est porté à la défense de la communauté noire, et il a été la première personne noire à être élu à une fonction publique dans ce qui est maintenant la Colombie-Britannique, et il a guidé cette province vers la Confédération. Au début des années 1900, des gens ont commencé à déménager de Victoria et de l’île Salt Spring pour s’installer dans Hogan’s Alley, un quartier de Vancouver qui est devenu un centre culturel et social, et le seul quartier majoritairement noir de la ville. La communauté Shiloh, en Saskatchewan, est devenue la première colonie noire de cette province autour de 1910. Et en Alberta, la colonie de Amber Valley a été fondée en 1910 par des familles afro-américaines qui ont migré de l’Oklahoma au Texas, et d’autres États voisins, en réponse à l’offre de terres gratuites du gouvernement canadien. SECTION 4 : Début de l’immigration noire Les meilleures terres nouvelles de l’Ouest Au cours de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle, le gouvernement canadien a incité une vague d’immigration et de colonisation de l’Ouest. Des terres dans les Prairies ont été publicisées aux éventuels immigrants américains et européens. Ceci incluait des publicités placées dans les journaux noirs de l’Oklahoma, où les lois des États avaient bafoué les droits et libertés fondamentaux des Noirs américains, et l’augmentation d’événements comme des lynchages avait poussé de nombreuses familles noires à considérer l’immigration au Canada. Cependant, le ministère de l’Intérieur (responsable de l’immigration) a priorisé les groupes entrants par ethnicité et par préférence décroissante. En tête de liste se trouvaient les Britanniques et les Américains blancs, suivis par les Européens du Nord et du Centre. Les Juifs, les peuples de descendance asiatique, les Roms, et les Noirs se trouvaient au bas de la liste. Bien que peu d’immigrants noirs sont entrés au pays, les colonisateurs ont réagi envers ceux qui l’ont fait avec préjugés. Les autorités canadiennes de l’immigration ont tenté d’empêcher l’arrivée d’immigrants noirs en provenance des États-Unis en limitant leur accès aux documents d’immigration et en les soumettant à des examens médicaux sévères à la frontière, interférant même avec les autorités médicales. Lorsque ces mesures n’ont pas fonctionné, les autorités de l’immigration ont envoyé deux agents en Oklahoma, leur travail consistant à dissuader les Noirs américains de se rendre au Canada. Et le 12 août 1911, le décret C.P. 1911‑1324 a été approuvé par le Cabinet canadien. Ce décret proposait une interdiction d’un an de l’immigration noire au Canada, dans le but de décourager et de limiter le nombre d’Afro-américains voulant s’installer dans les Prairies. Bien que le décret n’ait jamais été promulgué, il s’est joint à une longue liste d’interdictions sur l’immigration reflétant les idéaux discriminatoires du Canada. Malgré ces obstacles, les colonies noires sont devenues des communautés prospères. Celle de Amber Valley, par exemple, comptait diverses entreprises, une école, une église, et elle avait même sa propre équipe de baseball. Pour en apprendre davantage, visionnez la vidéo sur les meilleures terres nouvelles de l’Ouest. Image prise de la vidéo sur Africville (Historica Canada) Athabasca Landing, en Alberta (Canada. Ministère de l’Intérieur/Bibliothèque et Archives Canada/PA-040745) En 1793, une femme asservie appelée Chloe Cooley a été violemment ligotée par son asservisseur et transportée de l’autre côté de la rivière Niagara pour être vendue dans l’État de New York. À cette époque, l’abolition de l’asservissement gagnait du terrain à travers l’Empire britannique, et l’expérience de Chloe Cooley est devenue le catalyseur pour l’introduction de la Loi visant à restreindre l’esclavage dans le HautCanada par le lieutenant-gouverneur John Graves Simcoe. Visionnez la Minute du patrimoine de Chloe Cooley, et lisez sa biographie sur L’Encyclopédie canadienne. Organisez une courte discussion avec votre classe sur ce que vous avez appris. Pourquoi est-ce que l’asservisseur de Chloe Cooley n’a pas été puni? À votre avis, pourquoi son histoire a-t-elle été choisie comme sujet d’une Minute du patrimoine? Croyez-vous qu’elle soit une figure importante de l’histoire canadienne? Pourquoi, ou pourquoi pas? Que révèle son histoire sur les conditions sociétales des personnes asservies dans le Haut-Canada de cette époque? Image pris de la vidéo, Minute du patrimoine : Chloe Cooley (Historica Canada)

10 ACTIVITÉ 4.1 JOHN WARE 1. Visionnez la vidéo sur John Ware, écoutez l’épisode de balado de la série Fort et libre sur John Ware, et lisez sa biographie sur L’Encyclopédie canadienne. 2. En paires, créez une proposition de film sur John Ware et sur les débuts de la colonisation noire dans les Prairies canadiennes, en vous basant sur vos recherches. Cette proposition devrait inclure un court synopsis, une structure des actes, une liste des personnages, un public cible, et un tableau d’humeur constitué principalement d’images historiques. 3. Gardez ce qui suit à l’esprit lorsque vous déciderez des événements et des thèmes à inclure dans votre proposition : a. Quelles parties de sa vie étaient considérées comme importantes à l’époque? Et maintenant? b. Quel impact a-t-il eu? Cet impact était-il reconnu? c. Que révèle sa vie sur le contexte historique plus large? d. Quels aspects personnels de sa vie aimeriez-vous illustrer? Y a-t-il des aspects qui nous aident à comprendre la société canadienne d’aujourd’hui? e. De quelle manière est-ce que son histoire modifie ou ajoute quelque chose à votre compréhension de l’histoire des Noirs dans les Prairies, et dans le Canada en général? Pourquoi est-ce le cas? f. Est-ce que l’histoire de John Ware reflète l’expérience typique des immigrants noirs de l’époque? Pourquoi, ou pourquoi pas? Parmi les nombreux colons et cowboys qui vivaient dans l’Ouest durant les années 1800, l’un des plus connus est John Ware (vers 1845-1850 à 1905). John Ware a été asservi aux États-Unis avant de gagner sa liberté, de travailler comme cowboy, et de déménager en Alberta. Étant un éleveur, il vivait avec sa famille sur son propre ranch près de Calgary, en Alberta. Sa femme, Mildred, était issue d’une famille de chercheurs de liberté de Toronto. John Ware est l’un des nombreux Noirs canadiens à avoir réussi à prospérer malgré la discrimination anti-noire généralisée à laquelle ils faisaient face, tant au niveau public qu’au niveau gouvernemental. John Ware est reconnu aujourd’hui pour son courage, sa force physique, et ses habiletés en équitation. Profitez de cette occasion pour discuter du pouvoir de la perception. Demandez à vos élèves d’être attentifs à la façon dont l’histoire de John Ware est racontée habituellement, et à la manière dont cela pourrait nuire à notre compréhension de l’histoire des Noirs au Canada. CONSEIL À L’ENSEIGNANT OU L’ENSEIGNANTE John Ware, éleveur (Avec la permission de la bibliothèque et collections des ressources culturales numériques/Université de Calgary) Image prise de la série balado Fort et libre (Historica Canada)

11 ACTIVITÉ 4.2 Colonies et quartiers noirs 1. En classe ou à la maison, écoutez l’épisode sur Hogan’s Alley de la série de balados Trouver sa place. Au fur et à mesure que vous découvrez ce quartier, soyez attentif à la narration et au type d’informations qui sont partagées. Est-ce que la narratrice connecte l’auditeur à son sujet? Quel genre d’émotion ce rapport suscite-t-il chez l’auditeur, et en quoi cela pourrait-il être parallèle au rapport que les gens vivant dans Hogan’s Alley avaient avec l’endroit? Qu’aimeriez-vous savoir d’autre sur le quartier de Hogan’s Alley? 2. En paires, choisissez l’une des colonies de la liste ci-dessous et effectuez des recherches sur son histoire. Examinez les personnes, les événements, et les édifices importants, ainsi que les racines culturelles; trouvez le cœur de la colonie. Pourquoi cette colonie est-elle historiquement importante? Qu’est-ce que cela révèle sur le contexte dans lequel ces endroits se sont établis, et sur les circonstances auxquelles les habitants faisaient face? Que peuvent révéler les histoires des gens qui se sont installés dans ces colonies sur la vie des Noirs au Canada à l’époque? 3. Faites semblant d’être un guide touristique pour la colonie que vous avez choisie, et créez une brochure ou une affiche présentant son histoire et ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Utilisez ce que vous avez appris en écoutant l’épisode du balado sur Hogan’s Alley pour vous aider à décider quelles informations inclure, et comment présenter le tout à vos camarades de classe. 4. Affichez le matériel promotionnel autour de la classe. Durant les 15 ou 20 premières minutes, laissez un partenaire de chaque groupe explorer, tandis que l’autre partenaire présente le matériel et répond à des questions. Et puis, changez de rôle. Chaque colonie devrait avoir un tampon distinct que les élèves recevront comme « preuve de voyage. » Pour que vos touristes profitent au maximum de la visite de votre colonie, pensez à faire preuve de créativité avec vos effets visuels. Créez un panneau de la ville, apportez un objet ou un accessoire, etc. • Pour l’élève qui fait la présentation : lorsque vos camarades de classe arrivent, accueillez-les et agissez comme un guide touristique durant la présentation de l’histoire de la colonie. Soyez préparé et prêt à répondre à toutes les questions qu’ils pourraient poser. 5. Avec la classe, discutez des similitudes et des différences que vous avez notées entre les colonies. Se sont-elles développées de la même manière? À quels obstacles les habitants ont-ils dû faire face? Qu’est-ce que cela révèle sur les circonstances dans lesquelles ces colonies ont été placées? Si certaines colonies se distinguent des autres pour vous, quelle en est la raison? Avez-vous été surpris par quoi que ce soit durant vos recherches? Birchtown, Nouvelle-Écosse Brindley Town / Digby, Nouvelle-Écosse Africville, Nouvelle-Écosse Cape Breton, Nouvelle-Écosse Willow Grove, Nouveau-Brunswick Montréal, Québec Buxton (Elgin), Ontario Chatham, Ontario Toronto, Ontario Windsor, Ontario Sandwich, Ontario Amherstburg, Ontario Colchester, Ontario Owen Sound, Ontario Oakville, Ontario Winnipeg, Manitoba Amber Valley, Alberta Maidstone, Saskatchewan Victoria, Colombie-Britannique Hogan’s Alley (Vancouver), Colombie-Britannique Iqaluit, Nunavut Preston, Nouvelle-Écosse Oro Township / Oro-Medonte, Ontario Truro, Nouvelle-Écosse Dresden, Ontario (Établissement Dawn) Le camp des Klondikers, fleuve Yukon (H.J. Woodside/Bibliothèque et Archives Canada/PA-016157) Image prise de l’épisode de balado de la série Trouver sa place sur Hogan’s Alley (Historica Canada) Hogan’s Alley, 1969 (Archives de la Ville de Vancouver) Africville (Archives de la municipalité de Halifax/ 102-16N-0065.E) Localisez les communautés suivantes et placez-les sur une carte; ce sont tous des endroits où une communauté noire s’est installée.

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